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« L’humanité doit faire partie prenante de la santé mondiale » : réflexions sur la Conférence canadienne sur la santé mondiale

« L’humanité doit faire partie prenante de la santé mondiale » : réflexions sur la Conférence canadienne sur la santé mondiale
November 6, 2019

Muriel Mac-Seing et Rolande Chegno, doctorantes en santé publique (option en santé mondiale), École de santé publique de l’Université de Montréal (ÉSPUM)

CCGH crowd

Comment ne pas devenir pessimistes, voire ne plus s’intéresser à autrui, lorsque les problèmes nationaux semblent pulluler et désolidariser les populations à travers différentes régions de la planète? Cette dernière subit le poids des enjeux liés à divers déterminants tels que les changements climatiques, les conflits civils et armés, les enjeux politiques et la mauvaise gouvernance, exacerbés par l’Homo Sapiens, ni sage ni pensant des impacts de ses actions sur le long terme.

À l’ère globalisée où des dirigeants démagogues et des médias sociaux modulent les intérêts, et les mouvements sociaux éclosent, force est de constater qu’il devient critique d’adopter consciemment un regard différent. Ceci pour ne pas sombrer dans la spirale des événements, souvent peu compréhensibles à un entendement qui se veut « raisonné ».

C’est justement ce que la Conférence canadienne sur la santé mondiale, tenue les 17-19 octobre 2019, a tenté de faire à travers des échanges, des discussions et des réflexions meublés dans un contexte de diversité et d’inclusion autour de la thématique « Gouvernance pour la santé mondiale : pouvoir, politique et justice ».

Lors de la plénière d’ouverture, Sir George Alleyne, Directeur émérite à l’Organisation panaméricaine de la santé, a marqué le ton en nous incitant à ne laisser aucune place à « l’altérité (otherness) » qui divise, surtout quand il s’agit de santé ou d’accès aux services de la santé. Selon lui, l’équité doit se retrouver au cœur des enjeux relatifs à la couverture sanitaire universelle (CSU) pour éviter des dérives sociales. De plus, « l’humanité doit faire partie prenante de la santé mondiale », sans laquelle les disparités de santé croîtront davantage. L’atteinte de la CSU est un « processus progressif » et sur le long cours. Pour ce faire, aborder de front la gouvernance – bonne ou mauvaise – doit être parmi les premières priorités de tout gouvernement, et la société civile doit exercer une diplomatie suffisante pour adresser les problèmes de santé au niveau national.

Quant à elle, Lisa Forman, Professeure adjointe à l’École de santé publique Dalla Lana de l’Université de Toronto, nous a rappelé de l’importance de nous poser la question « Que veut-t-on dire exactement lorsque nous parlons de gouvernance en santé mondiale? » et jusqu’où s’étend le pouvoir dans la gouvernance afin d’être au même diapason et de dissiper les malentendus tant théoriques que programmatiques. Devant ces réflexions, une thématique semble émerger, celle du « changement pour ne pas perpétuer le status quo » parce que « le présent peut être de moins en moins utilisé pour prédire l’avenir », selon Charles-Antoine Barbeau-Meunier, jeune médecin-chercheur de l’Université de Sherbrooke.

Pour s’atteler à ces objectifs grandioses de CSU, d’équité et de bonne gouvernance, quelles postures devons-nous donc adopter?

Parmi tous les résultats de recherche diffusés et les propositions évoquées durant les différentes séances de présentation, nous retenons les suivantes :

  1. « évaluer et mesurer les impacts des solutions émises » ainsi qu’évaluer le processus de mise en œuvre, en plus « de reléguer aux oubliettes » certains critères qui oblitèrent le processus de changement (par Dr. Érica Di Ruggiero de l’École de santé publique Dalla Lana de l’Université de Toronto);
  2. « arrêter d’être hypocrites et d’appliquer les standards de qualité pour toutes organisations et tous états » (par Hossmam Elsharkawi, Vice-président de la Croix-Rouge canadienne);
  3. optimiser l’utilisation des applications, par exemple, dans des contextes de conflit et de guerre pour transmettre rapidement les informations et les stratégies d’avancement par la société civile (par Muzna Dureid, réfugiée syrienne au Canada, leader dans le mouvement des Casques blancs et fondatrice de la campagne Women Refugees, not Captives);
  4. porter rapidement à l’attention des décideurs les résultats et les données analysées de recherche (par Ahmad Firas Khalid, médecin et chercheur à l’Université McMaster);
  5. organiser la société civile avec des rôles et les responsabilités bien définis; et
  6. l’égalité entre les genres et dans le leadership est un dessein incontournable et les mesures pour y arriver sont concrètes, tel qu’illustré par les différents échanges tenus lors du petit déjeuner de réseautage au sein des Canadiennes leaders en santé mondiale et les délégué.e.s de la conférence.

Bien que la plénière sur la « Paix, conflits et gouvernance » ait momentanément jeté un doute sur notre capacité humaine à être solidaires et à apprendre de nos erreurs collectives, nous avons été revigorées et habilitées, en fin de conférence, à revoir nos privilèges implicites et à pratiquer, ou du moins à vouloir pratiquer, une santé mondiale plus solidaire, plus équitable et plus juste.

En effet, l’atelier interactif sur « Confronter le pouvoir et les privilèges : une tâche nécessaire pour atteindre un leadership diversifié en santé mondiale », mené par les divers membres du Groupe de travail sur l’inclusion du handicap de la Coalition canadienne de recherche en santé mondiale, nous a enseigné les principes fondateurs de l’intersectionnalité dont l’objectif ultime est de tendre vers une justice sociale et de rendre visibles les iniquités invisibles. Cet atelier nous a aussi permis, en groupes, d’appliquer concrètement ces principes critiques à nos réalités de recherche, d’interventions et de travail.

Pour finir, nous voulons souligner l’utilisation conviviale de l’application Whova qui a grandement facilité le réseautage entre nous, et la rencontre d’une communauté francophone en santé mondiale diversifiée, dynamique et engagée!

***

MurielMuriel Mac-Seing remercie la Fondation Leacross et la Société canadienne de santé internationale pour leur soutien financier à sa participation à la conférence.

 

 

RolandeRolande Chegno remercie l’École de santé publique de l’Université de Montréal pour son soutien financier à sa participation à la conférence.